Panorama, 04 février 2013
di Enzo Bianchi
Croire dans le Fils de Dieu devenu homme en Jésus de Nazareth, et reconnu comme le Christ, le Messie de Dieu, constitue, parmi les monothéismes, la spécificité de la « voie » chrétienne.
"Commentaire au Credo"
« Je crois en un seul Seigneur, Jésus Christ,
le Fils unique de Dieu,
né du Père avant tous les siècles :
il est Dieu, né de Dieu,
lumière, née de la lumière,
vrai Dieu, né du vrai Dieu,
engendré non pas créé,
de même nature que le Père ;
et par lui tout a été fait. »
La deuxième étape du Credo, après l’affirmation de la toute-puissance de Dieu, Père et Créateur, c’est la confession de Jésus Christ. Croire en ce Fils de Dieu devenu homme en Jésus de Nazareth, et reconnu comme le Christ, le Messie de Dieu, constitue en effet, parmi les monothéismes, la spécificité de la « voie » chrétienne. Mais, tandis que le Christ n’a pu être connu par ses premiers témoins qu’en tant qu’homme, dont la vie pleinement humaine a fait le récit de Dieu, la profession de foi choisit de partir « d’en haut », de Dieu.
Jésus Christ est donc proclamé « Seigneur », qui est le titre proprement divin que les croyants commencent à lui attribuer après sa résurrection. Et il est surtout décrit comme « le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles ». Le Credo reprend ainsi les idées transmises notamment par la Lettre aux Colossiens, où l’apôtre Paul définit le Christ comme le « Premier-né de toute créature » (Col 1,15) : le Fils est le premier être de l’univers à avoir été engendré par Dieu ; c’est par lui et en vue de lui que toutes les choses ont été créées. Il est donc Dieu, et préexiste auprès de Dieu, dès avant la création du monde. C’est cette même réalité du « commencement », où « le Fils unique est tourné vers le sein du Père » (Jn 1,18), qu’évoque le prologue de l’Évangile de Jean.
Pour définir cela, le Symbole de Nicée-Constantinople (adopté au concile de Nicée en l’an 325 et complété par le concile de Constantinople en 381) a recours à une série de concepts et de précisions servant à éviter toute confusion qui nierait au Christ la pleine divinité. Cette formulation complexe s’explique par des débats théologiques ardus, qui voulaient préciser les affirmations du Symbole des apôtres (du IIe siècle), lequel définit Jésus Christ plus simplement comme le « Fils unique » de Dieu et « notre Seigneur ».
En d’autres termes, Jésus Christ est Dieu, il a la condition de Dieu, il partage la plénitude de la divinité, il jouit d’une existence glorieuse, immortelle. Comme l’a écrit Karl Barth, « cette égalité du Christ avec Dieu est pour ainsi dire l’arrière-plan immobile et ultime d’où son chemin sort et auquel il retourne ».
En effet, comme le chante la Lettre aux Philippiens, le Christ « de condition divine, n’a pas voulu retenir jalousement le rang qui l’égalait à Dieu » (Ph 2,6) : au cœur du grand mystère de la Tri-unité de Dieu, le Fils a eu une pensée, un sentiment, un projet ; il ne parvenait pas à garder cette condition d’égalité à Dieu sans la donner, sans la partager, sans éprouver – en solidarité avec les hommes – le désir qu’ils participent eux aussi à sa condition divine. C’est le grand miracle de l’incarnation, qui va jusqu’à faire de nous aussi, si nous croyons, des « fils de Dieu » (Ga 3,26 ; 4,6).